Le Maître de Milan

« Franca était la femme, ses seins étaient ceux de Judith et de Vénus. L’infirmité de Franca, toute fois, semblait bien n’être qu’à Franca. Muette, le palais mal soudé, elle était à part. Subitement, la langue de Franca, qui n’avait jamais su parler, se détendait dans l’amour comme une queue furieuse de silence, rancunière et fortifiée, elle cherchait, contre le ferme et solide palais de cet homme, en se tressant avec la langue de cet homme, ce palais de bouche résonnant et fort qu’elle n’a pas eu. La langue de la muette, langue de la femme, chantait, guerroyait, discourait, délirait, comme une flamme lancée en liberté, péninsule infiniment féminine qui bouge dans la chair de l’autre comme une réplique dominatrice et fécondante. » p.64

« Des fleuves de femmes étrangères, maintenant traversaient Milan. Souvent elles étaient maigres, avec, pourtant, des seins modelés en pronostic amoureux et féminins. Leur langage était un miaulement désossé, barbotant dans l’os de leur tête… On en vit avec une ceinture de métal autour des hanches, une autre portait une robe mauve décolletée dans le dos, le dos était de couleur abricot, jusqu’aux vertèbres vitreuses les plus basses . » p.90

Le Maître de Milan, xx, 19xx